top of page
  • Photo du rédacteurCarlyne Sevestre

Invention de salarié : la recette du succès


De nombreuses entreprises doivent leur succès à leur capacité d’innover. Les inventions qui en résultent peuvent être protégées par des droits de propriété intellectuelle et plus particulièrement le droit des brevets.


Les brevets permettent d’obtenir un avantage technologique décisif sur un marché et participent fortement à la valorisation d’une société. L’invention brevetée peut être exploitée de deux manières : soit directement par la société, soit par le biais de licences à des tiers.


Un brevet protège une invention pour une durée de 20 ans, sous réserve qu’elle remplisse les critères de brevetabilité, à savoir la nouveauté, l’activité inventive et l’application industrielle. [1]


" Dans les entreprises innovantes, ce sont généralement les salariés, parce qu’ils sont aux fourneaux, qui concoctent des inventions."

Dans les entreprises innovantes, ce sont généralement les salariés, parce qu’ils sont aux fourneaux, qui concoctent des inventions. Se pose alors les questions de l’intégration de ces inventions dans le patrimoine de la société et du traitement des salariés inventeurs.


À défaut de stipulations contractuelles plus favorables – dans le contrat de travail notamment – ce sont les dispositions de l’article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle qui régissent la question de la titularité de l’invention d’un salarié.


Deux types d’inventions doivent être distingués :

  • les inventions de mission : elles sont réalisées par le salarié dans le cadre de la mission inventive propre à sa fonction ou dans le cadre d'études et de recherches qui lui sont explicitement confiées. Elles sont automatiquement cédées à l'employeur et font l’objet d’une rémunération supplémentaire ;

  • les inventions hors mission : elles appartiennent par défaut au salarié, mais si elles ont été réalisées dans le cadre des fonctions du salarié, ou dans le domaine des activités de l'entreprise, ou par la connaissance ou l'utilisation des techniques ou moyens spécifiques à l'entreprise, l'employeur a alors le droit de s’en faire attribuer la propriété ou la jouissance. Si elles sont attribuées à l’employeur, elles font l’objet du paiement d’un juste prix au bénéfice du salarié.

Le salarié auteur d'une invention, quelle qu’elle soit, doit en faire immédiatement la déclaration à son employeur.[2] Cette déclaration doit contenir certaines informations, notamment le type d’invention dont il s’agit selon le salarié.[3] Cette déclaration d’invention doit être acceptée par l’employeur puis après accord des parties sur la catégorie de l’invention, le régime approprié lui sera appliqué.[4]


Ensuite, en cas de dépôt d'une demande de brevet et lors de la délivrance dudit brevet, l’employeur devra tenir informé le salarié inventeur, qui devra être mentionné comme tel dans le brevet.[5]


" Sans que l’invention fasse nécessairement l’objet d’un dépôt de brevet, un salarié auteur d'une invention de mission bénéficie d'une rémunération supplémentaire "

Sans que l’invention fasse nécessairement l’objet d’un dépôt de brevet, un salarié auteur d'une invention de mission bénéficie d'une rémunération supplémentaire déterminée par une convention collective, un accord d'entreprise ou son contrat de travail, tandis qu’un salarié auteur d’une invention hors mission attribuée à l’employeur doit en obtenir un juste prix fixé par les parties selon la valeur de l’invention.


" tandis qu’un salarié auteur d’une invention hors mission attribuée à l’employeur doit en obtenir un juste prix fixé par les parties selon la valeur de l’invention."

Ces rémunérations peuvent être forfaitaires ou proportionnelles et dépendre de plusieurs critères. En cas de désaccord entre l’employeur et le salarié, la détermination de la rémunération supplémentaire ou du juste prix est soumise à la Commission nationale des inventions de salariés siégeant auprès de l’INPI ou au tribunal judiciaire compétent.[6] Sont notamment pris en considération les apports initiaux de chacun ainsi que l'utilité industrielle et commerciale de l'invention. En cas de succès de l’invention, la note peut être salée !


En tout état de cause, tout accord entre le salarié et son employeur ayant pour objet une invention doit, à peine de nullité, être constaté par écrit. Les communications au sujet de l’invention doivent se faire par un moyen permettant de prouver la réception par l’autre partie.[7]


Le salarié et l’employeur doivent s'abstenir de toute divulgation de nature à compromettre l'exercice des droits de chacun pour deux raisons : d’une part parce que l’invention doit répondre au critère de nouveauté pour être brevetable et d’autre part parce que la demande de brevet est d’abord confidentielle pendant 18 mois.


" Attention à bien suivre la recette ! Le droit au brevet appartient par défaut à l'inventeur."

Attention à bien suivre la recette ! Le droit au brevet appartient par défaut à l'inventeur.[8] Si un brevet a été déposé par l’employeur sans l’accord du salarié inventeur et alors qu’il existe un débat sur la catégorie de l’invention, ce dernier pourra revendiquer la propriété du brevet s’il s’agit finalement d’une invention hors mission non attribuable.[9]


En outre, parce qu’une demande de brevet est obligatoirement rendue publique au bout de 18 mois, il est parfois préférable de ne pas déposer de brevet mais de couvrir l’invention par le secret des affaires. Vous savez, l’histoire du Nutella dont personne ne connaît la recette !


Le secret d’affaires s’applique à toute information (i) qui n’est pas généralement connue ou aisément accessible, (ii) qui revêt une valeur commerciale du fait de son caractère secret et (iii) qui fait l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, pour en conserver le caractère secret.[10]


Ainsi, le secret des affaires devra être obtenu et utilisé avec l’accord de son titulaire.


En matière de protection des inventions, tant au regard du droit des brevets et son critère de nouveauté qu’au regard du secret des affaires, les connaissances du salarié sont déterminantes. Afin de s’assurer de la non-réutilisation de ces connaissances par un concurrent, il peut être intéressant de prévoir une clause de non-concurrence dans les contrats de travail.[11]




[1] Articles L.611-2 1° et L. 611-10 du Code de la propriété intellectuelle [2] Article R.611-1 du Code de la propriété intellectuelle [3] Voir les articles R.611-2 à R. 611-5 du Code de la propriété intellectuelle [4] Article R.611-6 du Code de la propriété intellectuelle [5] Article L.611-9 du Code de la propriété intellectuelle [6] Article L.615-21 du Code de la propriété intellectuelle [7] Article R.611-9 du Code de la propriété intellectuelle [8] Article L.611-6 du Code de la propriété intellectuelle [9] Article L.611-8 du Code de la propriété intellectuelle [10] Article L. 151-1 du Code de commerce [11] Voir l’article de Salades d’Avocates du 7 juillet 2021, T. Lambert : La levée de la clause de non-concurrence : prudence ! ici [12] Article R.611-7 du Code de la propriété intellectuelle

Posts récents

Voir tout
bottom of page