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  • Photo du rédacteurThaïs Lambert

Pacte d'actionnaires, rachat forcé d'actions et clause de non-concurrence : alerte vigilance !

Dernière mise à jour : 22 mars 2022

Vous le savez surement déjà, le pacte d'actionnaires a vocation à organiser les relations entre les associés et la société mais également entre les associés. Il s'agit d'un acte confidentiel, non obligatoire, souvent rédigé à la création d'une société.


Il est souvent fréquent d'y inclure des clauses protectrices de la société comme l'exclusion d'un associé en cas de commission par ce dernier d'un acte attentatoire à l'intérêt de la société ou encore l'engagement de non-concurrence des associés.


Si le pacte d'actionnaires n'est régi par aucune disposition légale, il n'est pas non plus permis aux associés d'y prévoir n'importe quoi ! C'est ce que vient nous rappeler la Cour d'Appel de Paris dans un arrêt du 21 octobre 2021 (n°18/21284) qui mérite toute notre attention.


Les faits

Le 28 novembre 2021, quatre actionnaires d'une société ont signé un pacte d'actionnaires.


Le 7 novembre 2014, un des actionnaires (appelons le Monsieur Dupont), salarié de la société et membre du conseil de surveillance, a été licencié pour faute grave puis révoqué de son mandat de membre du conseil de surveillance. Ce licenciement a donné lieu à une procédure engagée par Monsieur Dupont devant le Conseil de prud'hommes.


Le 15 avril 2015, Monsieur Dupont s'est vu notifier le rachat forcé de ses actions pour les motifs suivants : licenciement pour faute grave et violation de la clause de non-concurrence. Monsieur Dupont s'est opposé à cette vente en contestant fermement tout manquement à ses obligations au titre du pacte.


Malgré cette opposition, les actions de Monsieur Dupont ont été transférées le 3 juin 2015.


Le 28 novembre 2016, le Conseil de prud'hommes a jugé le licenciement de Monsieur Dupont sans cause réelle et sérieuse.


La procédure

C'est dans ce contexte que Monsieur Dupont a assigné la société et l'associé lui ayant notifié le rachat forcé de ses titres considérant d'une part que son licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse ne pouvait pas justifier ce rachat et d'autre part que la clause de non-concurrence évoquée était nulle.


En première instance, Monsieur Dupont a été débouté de ses demandes par le tribunal de commerce de Paris. Il a alors interjeté appel de cette décision.


En appel, Monsieur Dupont demandait notamment à la Cour de :

  • dire et juger que la procédure de rachat forcée constituait une sanction pécuniaire prohibée par l'article L1331-2 du code du travail et qu'elle devait par conséquent être réputée non écrite ;

  • dire et juger que son licenciement sans cause réelle et sérieuse ne pouvait justifier le rachat forcé de ses titres ;

  • dire et juger que la clause de non-concurrence du pacte était nulle en raison "de son objet très général, de son caractère illimité dans l'espace, et de l'absence de contrepartie financière" ;

et donc pas conséquent, de dire et juger qu'aucun transfert de propriété de ses actions n'avait pu avoir lieu et le rétablir dans ses droits d'actionnaires.


La position de la Cour d'Appel

Sur la procédure de rachat forcée, la Cour d'appel en a conclu que :

La promesse de vente en cas de cessation des fonctions stipulée à l'article 5 du pacte d'actionnaire, qui n'a pas été mise en oeuvre à l'encontre de M. X en qualité de salarié mais en qualité d'actionnaire investisseur et qui s'applique à de nombreuses hypothèses telles que la révocation du mandat social et la violation des clauses de non concurrence exclusivité ne peut être qualifiée de sanction pécuniaire prohibée au sens de l'article L1331-2 du code du travail.

Par ailleurs, sur le licenciement pour faute grave, la Cour d'appel a retenu que :

S'agissant du licenciement pour faute grave [...] celui-ci ne peut justifier la mise en œuvre du rachat forcé de ses actions faute d'avoir été constaté par une décision de justice ayant autorité de la chose jugée.

Enfin, sur la clause de non-concurrence, la Cour a rappelé que, pour être valide, une clause de non-concurrence devait notamment répondre aux critères suivants :

  • être limitée dans l'espace : condition respectée en l'espèce car la clause était limitée à l'Union Européenne ;

  • être proportionnée au but poursuivi : à ce propos la Cour a constaté que "la clause de non concurrence aurait donc pour effet de lui [Monsieur Dupont] interdire toute activité dans ses domaines de compétence sur un territoire extrêmement vaste " et qu'elle était par conséquent disproportionnée ;

  • prévoir une contrepartie financière : à ce titre, la Cour précise en effet que, Monsieur Dupont étant également salarié de la société, il convenait de vérifier que la clause de non concurrence prévoyait bien une contrepartie financière, ce qui n'était pas le cas. Elle précise à ce propos que :

Sa qualité d'actionnaire n'est pas de nature à faire échapper la clause à cette exigence quand bien même les faits de concurrence déloyale évoqués par la société Ysance à l'appui de ses prétentions sont tous antérieurs à son départ de la société, tant en qualité de salarié que d'actionnaires et relèvent essentiellement d'une violation de son obligation de loyauté.

La Cour en a donc conclu que la clause de non-concurrence, sur laquelle était fondé le rachat forcé des titres de Monsieur Dupont était nulle.


Par conséquent, elle ordonnait à la société de rétablir Monsieur Dupont dans ses droits en tant qu'actionnaire.


Ce qu'il faut en retenir

Il faut être vigilant et prêter une attention particulière à la rédaction de son pacte d'associés ! C'est la leçon principale à retenir de cette décision.


La nullité d'une clause peut entrainer l'inefficacité d'un mécanisme prévu par le pacte. C'est le cas dans l'arrêt que nous venons d'étudier : il est important de prévoir des hypothèses de rachat forcée (également appelée clauses de leaver) mais si celles-ci font références à des obligations qui ne respectent pas les conditions légales, elles s'avèrent totalement dépourvues d'efficacité !


👩🏻‍🍳Pour cela deux conseils :

  1. aller consulter notre recette du pacte d'associés ;

  2. ne pas hésiter à nous contacter si vous avez besoin d'aide dans la rédaction de vos pactes, vous commencez à nous connaitre, on ne vous racontera pas de salades 😉 !

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